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16.11.2016

Tests sanguins chers et qui induisent en erreur

Prise de position de la Société Suisse d’Allergologie et d’Immunologie (www.ssai.ch)

La Commission de spécialité clinique et la Commission de diagnostic de laboratoire de la Société Suisse d’Allergologie et d’Immunologie s’expriment avec fermeté dans une prise de position contre l’utilisation répandue de tests sans fondement scientifique pour le diagnostic d’allergies et d’intolérances alimentaires. Ces tests sont coûteux et aucun lien n’a été démontré avec des symptômes ou des tableaux cliniques. Cela s’applique notamment aux tests anticorps IgG et aux tests ALCAT.

«Il est fait en Suisse un large usage de tests inappropriés et sans fondement scientifique pour soi-disant établir le diagnostic d’allergies et intolérances alimentaires. Ces tests coûteux sont sans utilité pour le patient. Il n’existe à ce jour aucune donnée convaincante issue d’études scientifiques qui puisse apporter la preuve d’un lien entre les résultats des tests et les symptômes ou tableaux cliniques. Parmi ces tests on compte le dosage des anticorps IgG et les tests de cytotoxicité cellulaire (ALCAT).

Réactions à médiation immune 
A l’origine des allergies alimentaires à médiation immune se trouvent les anticorps IgE qui sont dirigés contre des protéines des aliments qualifiées d’antigènes et qui peuvent provoquer une réaction allergique immédiate. Pour établir le diagnostic, on effectue des tests cutanés (prick test) avec des extraits d’aliments ou des aliments non modifiés (natifs) et des dosages sanguins d’IgE. Les résultats indiquent uniquement une prédisposition à développer une allergie alimentaire, mais pas forcément une allergie à proprement parler. Ces tests fiables et validés doivent donc être interprétés en tenant compte des antécédents des patients.

Confusions fréquentes 
Les intolérances alimentaires comme par exemple l’intolérance au lactose ou les rares intolérances aux agents conservateurs ou aux colorants artificiels (codes E) sont souvent qualifiées à tort d’allergies. Ces réactions se produisent cependant sans la participation bien établie du système immunitaire. Elles ne peuvent donc pas être diagnostiquées aux moyens de tests cutanés ou sanguins, mais au moyen de diètes d’exclusion ou de tests de provocation orale sous contrôle médical.

Tests inutiles 
Les tests anticorps IgG et de cytotoxicité sont préconisés à tort pour l’élaboration du diagnostic en présence d’une grande variété de plaintes et de maladies prétendument liées à l’alimentation: plaintes abdominales (ballonnements, sensation de satiété, crampes, diarrhées, côlon irritable), maladies des voies respiratoires (toux chronique, asthme, infections récurrentes), maux de tête et migraine, maladies rhumatologiques, douleurs musculo-articulaires, maladies de la peau (eczéma, psoriasis), fatigue chronique, surpoids mais aussi déficit d’attention. En ce qui concerne le test de dosage des anticorps IgG ou IgG4, il s’agit d’une méthode immunologique qui donne lieu à des résultats mesurables, mais qui ne sont pas cliniquement validés. La relevance clinique et la signification de résultats positifs n’est donc pas prouvée. Comme les allergies alimentaires sont médiées par les IgE et qu’en cas d’intolérance alimentaire il n’y a pas de sensibilisation immunologique, les tests proposés par différents laboratoires et industries qui dosent les anticorps IgG ou IgG4 dirigés contre les allergènes ou les additifs alimentaires sont inutiles. En outre, ces anticorps dirigés contre les aliments sont aussi présents dans le sang d’individus sains. On peut donc ainsi apporter la preuve que ces dosages n’ont aucune valeur scientifique pour établir un diagnostic d’intolérance/allergie alimentaire.

Conseils inappropriés 
En ce qui concerne les autres examens sanguins, il s’agit de tests appelés tests cytotoxiques d’allergie ou tests d’activation des leucocytes, comme le test ALCAT (Antigen Leukocyte Cellular Antibody Test). Certains médecins et laboratoires les effectuent dans le cadre du diagnostic d’intolérances alimentaires. En cas de réaction positive des globules blancs du patient contre une variété d’extraits alimentaires et d’additifs alimentaires, il sera instamment recommandé au patient de renoncer à toute une série d’aliments pour ne plus avoir de symptômes. Dans la foulée, il est suggéré que les intolérances sont un problème croissant de notre civilisation moderne et qu’elles concernent 78% de la population. Même si effectivement la fréquence des allergies a augmenté durant ces dernières années, ces chiffres sont évidemment trop hauts, en particulier sur la base du nombre des patients chez lesquels une intolérance est clairement prouvée à la suite d’un test de provocation ou d’une diète d’exclusion.

On considère en Suisse qu’environ 15% de la population est intolérante au lactose. La maladie coeliaque (intolérance au gluten) concerne environ 1% de la population. Environ 4 à 5% de la population adulte et 6 à 8 % des enfants souffrent d’allergies alimentaires médiées par les anticorps IgE.

L’Académie Européenne pour l’Allergie et l’Immunologie clinique (EAACI), tout comme la Société Suisse d’Allergologie et d’Immunologie (SSAI) et d’autres sociétés médicales internationales considèrent inappropriés ces tests cytotoxiques pour le diagnostic des allergies et intolérances alimentaires et cela en particulier à cause du fait qu’il n’existe aucune preuve scientifique de leur pertinence clinique. Il est donc conseillé, en présence de symptômes compatibles avec une allergie ou une intolérance alimentaire, de prendre contact avec son médecin de famille ou avec un spécialiste reconnu.»

Forum Médical Suisse 2016;16(5):121–122

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